Ca y est, ça a marché ! Le nombre de mariage est en train de repartir à la hausse, et même le nombre de bébés ! Ils sont forts, ces communistes chinois quand même. Oui mais pas très fûte-fûte...
Depuis quelques années, on le sait, la baisse du taux de fécondité affolait le gouvernement. Les jeunes ne se marient plus, font des enfants très tard, quand ils se décident. Cette année 2024, la démographie chinoise est dépassée par l’Inde ! Et on vieillit. Dans dix ans, il y aura en Chine autant de retraités qu’en Amérique ! Un choc mortifiant pour ce gouvernement fier de son capital de 1,4 milliards de Chinois, de sa population « jeune et active ». A cause du chômage, du ralentissement économique, - des notions récentes là-bas -, on ne voit pas l’intérêt de fonder une famille.
Souvenons-nous de la politique de l’enfant unique jusqu’en 2015, ces enfants-rois, enfants-tyrans devenus ingérables mais qui ont quand même stimulé l’économie. Et qui maintenant n’ont pas envie de se priver pour procréer. Souvenons-nous des parents hors-la-loi qui risquaient le pire, les amendes, l’ostracisme, l’obstruction administrative, en faisant quand même un deuxième enfant. Aujourd’hui les autorités devraient les féliciter, ces « mauvais citoyens » ! Au passage, individualistes que nous sommes, on s’est demandé de quel droit, - mais DE QUEL DROIT !! - les dirigeants politiques se mêlent de la vie privée de leurs administrés !
Tout est pardonné. Et l’Etat continue de mener son peuple à la baguette. Lequel peuple est de moins en moins obéissant. Sauf quand on le prend par les bons sentiments. Ainsi, pour encourager les jeunes de moins de 25-30 ans à se marier, et vite, l’administration communiste a organisé au printemps dernier des speed dating géants sous les pêchers en fleurs. Pique-niques, jeux, peinture sur ombrelle, pêche à la crevette… Ils ont mobilisé tous leurs neurones pour trouver des occupations romantiques afin de faire connaissance, mais des activités pas trop longues pour pouvoir changer de partenaire si ça ne « matchait » pas. Des speed-dating privés, pour riches célibataires, ou pour jeunes solos, ça existait, mais jamais un speed-dating organisé par le Parti !
Le speed-dating privé, pour jeunes cadres...
... et le speed-dating du PC, pour tout le monde
Il paraît que les jeunes ont bien aimé. En Chine comme à Paris, tout ce qui aide à « pécho » est bienvenu. C’était plus fun, disaient-ils, que les rencontres organisées par les parents où on rencontre le promis, la promise une seule fois avant de convoler.
Là-bas, les parents choisissent ton fiancé
Oui, se mêler de la vie intime de sa progéniture, c’est normal en Chine. Je sélectionne un conjoint pour mon enfant parce que je le connais mieux que lui-même. Chaque week-end dans de nombreuses villes, les parents se retrouvent dans un parc public avec leur pancarte de « vente » de candidat (e ) : sexe, âge, taille, job, classe sociale, caractère… Parfois ça marche. Mais si le jeune est déjà amoureux d’une autre qui ne plaîtpas à la famille, c’est le drame : éjectée, quels que soient l’intensité des sentiments entre les tourtereaux. On obéit, c’est ainsi. C’est dans les gènes de ces Chinois disciplinés.
« Rendre la vie plus sucrée »
Alors quand les slogans étatiques ordonnent : « Laissez fleurir la passion, cueillez l’amour pour rendre la vie plus intense, plus belle, plus sucrée », eh bien, on fonce sur la friandise. Il semble donc que déjà un frémissement s’observe dans les chiffres.
Il est probable aussi que d’autres coups de pouce aient aidé : la prime à la mariée de moins de 25 ans - plus elle est jeune, plus elle fera d’enfants. Elémentaire ! -, l’allongement du congé parental, la baisse des charges autour de l’accouchement et… une idée scandaleuse, comme ça : cette proposition de loi qui autoriserait les célibataires à congeler leurs ovocytes. Impensable pour un pays qui n’envisage pas une seconde de défendre le statut de mère célibataire, comme chez ces dépravés d’Occidentaux.
Mère célibataire, encore un combat
Meili est commerçante, a une maman qui l'aide, et n'a pas eu l'agrément de la famille du père. Mais elle a gardé le bébé.
Beaucoup de femmes n’ont pas attendu la loi pour franchir le pas. Elles vivent dans une grande ville, sont commerçantes indépendantes, elles ont une mère qui peut faire la nounou, elles ont fait un bébé toutes seules. Pas envie de jouer les esclaves auprès d’un mari qui, comme le veut la tradition, ne fout rien à la maison. Elles courent des risques : se faire mal noter au tableau de bord des « bons citoyens », voir donc leur périmètre de mobilité se restreindre, leur bébé risque de ne pas décrocher son certificat de naissance ni ses papiers administratifs pour réussir dans le pays ; quant à l’employeur de la mère indigne, borné et obéissant, il va lui faire payer cette déviance impardonnable.
Depuis 2016, les bureaucrates sont pourtant obligés de délivrer le certificat de naissance avec ou sans la preuve de parents mariés, ensuite, l’employeur est tenu de faire une demande d’assurance santé pour le bébé de son employée. Beaucoup refusent, en province surtout où les gens sont rétrogrades ; ce qui oblige la femme à lui faire un procès. Ouf ! il y a encore du chemin, les pauvres.
Mon enfant grandira dans ce pays ? Laisse-moi réfléchir…
Les dirigeants chinois ne manquent pas de culot… et de naïveté : ils entendent piloter la libido de leurs citoyens avec le bâton et la carotte, okay. Ils oublient une évidence : au-delà de la récession économique, plus on est éduqué, moins on a envie de faire grandir ses enfants dans une dictature.
Catherine Schwaab
Catherine Schwaab
Paris Match - Sciences Po - IFM - Personnalités, mode, tendances et découvertes
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