DANS L'OEIL DE CATHERINE SCHWAAB

Sorties parisiennes, bons plans parisiens et autres, chroniques et réflexions sur la vie, la mort, les djeuns et la coiffure !

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Par Catherine Schwaab
24 oct. · 2 mn à lire
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La Lune s’habille en Prada

La maison de couture va habiller les astronautes américains de la mission Apollo qui va explorer la Lune en 2026. Ils sont forts, ces Italiens !

Autrefois, les marques de luxe se battaient pour habiller une star sur le tapis rouge du Festival de Cannes ou aux Oscars à LA. Aujourd’hui, changement de braquet : le showbiz, ses célébrités, ses bimbos, c’est dépassé, décrédibilisé, démodé, out !  Pour « anoblir » une maison, on l’inscrit dans l’Histoire. Mieux : dans le cosmos. Griffer une combinaison d’astronaute, ça vous a quand même une autre allure que de poser son logo sur le sac à main de Nicole Kidman ou de Kim Kardashian.

Des tenues de plombiers en milieu extrême

Voici les combi, avec la bande rouge de Prada.

Oui, j’ai bien dit une combinaison d’astronaute qui marchera sur la Lune en 2026. Prada a tiré le premier, en signant un partenariat avec l’Américain Axiom Space, le couturier des astronautes. Grâce à eux, les ateliers italiens se sont convertis à l’engineering : réserve d’oxygène, circuit de refroidissement à eau, isolation thermique, pressurisation… et des soufflets pour pouvoir bouger, voilà le brief pour créer la « pièce à manches ». La « création » pèse plus de 100 kilos. Ainsi harnachés, les top-models, pardon les trois « spacemen » and one spacewoman  ne défileront pas sur le podium. Ils devront travailler, creuser, prélever… quand ils ne seront pas obligés de réparer leur navette.

Dangers mortels

La combi “à plat”’ et ses “gadgets” de survie

Habillés de ce couteau suisse de survie en milieu hostile, leur vie dépendra de la technologie et de rien d’autre. Car on sait que sur la Lune comme dans l’espace, il n’y a pas d’oxygène, donc, on ne peut pas respirer sans assistance. Comme vous l’expliquent les spécialistes : « les fluides d'un homme exposé dans le vide gèlent ou s'évaporent presque instantanément, entraînant une perte de conscience au bout d'une quinzaine de secondes et un coma irréversible au bout d'une minute. » C’est le crime parfait. Et ça n’est pas tout : « Le soleil, non filtré par l'atmosphère, peut rendre aveugle de manière instantanée. En l'absence d'atmosphère pour brasser le flux thermique du soleil, la température des parties du corps directement exposées aux rayons de l'astre peut atteindre 150 °C tandis que les parties situées à l'ombre peuvent descendre jusqu'à −120 °C. » Cramer dans le cosmos… Et comme ces astronautes iront se balader sur le sol lunaire, ils ne seront plus protégés par l'atmosphère terrestre, donc ils risquent de se retrouver dans des nuages de « micro-météorites et de rayons cosmiques », en clair, des poussières de matière interplanétaire essentiellement composées d’azote, donc toxiques car dénuées d’ oxygène. Je ne vous fais pas un croquis mais l’azote c’est bien, à condition d’être mélangé à l’oxygène. Donc l’azote sur la Lune, c’est mortel. Prions pour que ces courageux athlètes-aventuriers ne jettent pas un froid sur la marque en mourant bêtement dans leurs bottes isolantes.  

Formidable coup de com’

 Avaient-ils vraiment besoin de la marque Prada, les ingénieurs de la Nasa, pour élaborer leur scaphandre ? On en doute. Le truc est tellement technologique que les questions du style passent en dernier. En revanche, pour la communication, les photos, montrer la bande rouge de la plus belle maison de mode italienne devrait attirer un nouveau public, en général peu porté sur les performances spatiales. Voilà peut-être leur intérêt.   

Disons-le franchement, c’est surtout pour Prada que le coup de com va se révéler efficace. En co-créant cette combinaison cosmique, la maison se hisse au sommet de la gloire planétaire. Un petit pas pour l’homme, un saut de géant pour Prada. On ignore combien coûte le vêtement mais si l’on se réfère aux prix du marché - si l’on peut dire -  c’est de l’ordre de 4,4 millions de dollars la pièce. Avec Axiom Space, ils doivent se partager les frais.

En France aussi, merci Cardin !

Contrairement à Pierre Cardin qui s’était glissé dans la combi de Neil Armstrong dans les années soixante, Miuccia ne va pas tester les coutures sur sa propre morphologie. Peut-être son fils, Laurenzo Bertelli, visiblement emballé, qui a signé le deal. A propos de Neil Armstrong : qui avait élaboré sa combi ? Playtex ! Le fabricant de gaines et soutien-gorge, parfaitement ! Et leur filiale continue d’alimenter la Nasa en accessoires divers à forte armature et rembourrage calculé.

On le voit, à 60 ans d’intervalle, la conquête spatiale fascine toujours. Dans les sixties, Courrèges, avait imaginé une collection « Moon Girl », Cardin, une collection « Cosmocorps ». C’était épuré, trapèze, moderne, en vinyl, plexi, plastique, matières impensables en couture, c’était révolutionnaire !  

Un modèle Pierre Cardin “Cosmocorps”

Le Thomas Pesquet allemand, Mathias Maurer, et Rodrigo Basilicati en septembre dernier

Mais en septembre dernier, Cardin a dû jubiler depuis les étoiles : son neveu, Rodrigo Basilicati sauve notre fierté ! Il a aussi signé une collaboration avec l’Agence spatiale européenne pour concevoir deux combinaisons, une intérieure et une extérieure. Les astronautes européens les enfileront durant les exercices de simulation de surface lunaire, au centre Luna de Cologne, en Allemagne. Il s’agit là aussi de « développer des textiles résistant aux conditions extrêmes. »

Avec les bouleversements climatiques, la mode désormais ça n’est plus les robes de mariée piquées de diamants, c’est lampe flash, parachute et fusée de détresse.

Catherine Schwaab