En manque de combattants et de vaillants Russes idolâtres, le monstre du Kremlin ose tout. Plus c’est gros plus ça marche ?
Sans limites. Sans filtre. Sans morale. Si l’on doutait encore de l’indécence de Poutine, là, on atteint des sommets. Son ambition d’un empire russe omnipotent se heurte aux contingences : la démographie en chute libre, les déserteurs et la fuite des cerveaux. En bref : son rêve de grande Russie manque de bras et de chair à canon. Alors, ni une ni deux, il pousse les collégiennes à faire des enfants. Oui, les collégiennes, des gamines de 13, 14, 15, 16 ans. Jusqu’en mars dernier, c’étaient les étudiantes que les autorités russes encourageaient à tomber enceintes. Une prime de 100'000 roubles (1100 euros) donnée en cash et en une fois à celles dont la grossesse est avérée. La mesure a donc été élargie à des adolescentes très mineures. Evidemment, les parents sont furax. Dans ce pays à la foi orthodoxe qui respecte les traditions, à commencer par la virginité, la mesure a de quoi choquer. Mais si quelqu’un ose l’ouvrir, la répression s’abat sans pitié, poursuites judiciaires, amendes quand ça n’est pas la prison et ses tortures. De toutes façons Poutine s’en fout.
Poutine et ses deux filles Maria et Katerina. L’une serait mathématicienne, l’autre, endocrinologue. Elles vivraient en Russie.
Lui qui exige « au moins trois enfants » de ses concitoyens mariés, considère qu’il a rempli sa mission nataliste : il a eu deux filles d’un premier mariage, nées en 1985 et 1986, puis deux garçons issus de sa liaison avec la célèbre gymnaste Alina Kabaeva de 30 ans sa cadette (nés en 2015 et 2019, en Suisse). Il aurait, en outre, eu un enfant avec une femme de ménage devenue subitement millionnaire dès la naissance d’Elizavata en 2003. Ses grandes filles l’ont fait grand-père de deux garçons (2012 et 2017) et d’une fille (2017). Est-ce qu’il conditionne déjà sa petite-fille de 8 ans à tomber enceinte avant de préparer son bac ?
Sans surprise, il a imposé une loi qui interdit les modes de vie «sans enfant» en les qualifiant d’«idéologie extrémiste», il rétablit la très « vintage » distinction de « mère-héros » - un peu comme Trump qui exalte la « Tradi-wife » ; il criminalise ce qu’il appelle la «coercition» à l’avortement, et il augmente les allocations de maternité. Poutine parle de patriotisme, alors qu’il s’agit de dictature de guerre. Mais… Il perd son ascendant sur les jeunes.
Non seulement 250'000 soldats russes sont morts au front, mais des centaines de milliers de jeunes instruits et diplômés ont fui le pays. Et en Russie plus encore qu’ailleurs, le taux de natalité est tombé à son plus bas niveau depuis 25 ans, tandis que l’espérance de vie plafonne à 58,8 ans pour les hommes (à cause de l’alcoolisme), et 72 ans pour leurs vaillantes congénères qui rêvent toutes d’épouser un Européen, elles vous le disent dès les premières minutes de conversation perso. Non, à part la Nomenklatura, on ne vit pas heureux en Russie
Maintenant ce monstre froid active un autre levier pour augmenter coûte que coûte sa population : il mène une propagande ouverte pour adopter des enfants ukrainiens. Ceux qui ont été raptés lors des différentes offensives et invasions depuis 2014. Le ministère de l’Éducation de la République populaire de Louhansk (envahie par la Russie en 2014) en publie même un catalogue, via une plate-forme internet (à laquelle on n’a pas accès de France) : des photos de 300 enfants décrits avec moults détails sur le site. Ils ont entre 0 et 17 ans, on décrit leur physique, la couleur des yeux, des cheveux, leur état de santé et même leur degré de docilité (!!) sous l’intitulé « niveau d’obéissance ». Comme on le ferait pour un chien ou un chat.
Le fondateur de l’ONG Save Ukraine, Mykola Kuleba n’a pas le moindre doute sur la provenance de ces pauvres gosses. « Il s’agit d’un trafic flagrant d’enfants ukrainiens, la Russie ne se donne même plus la peine de s’en cacher » dénonce-t-il.
On se souvient qu’il y a trois ans, peu après le début de l’invasion russe, des « colonies de vacances » faisaient croire aux parents ukrainiens qu’on allait mettre leur progéniture à l’abri. En fait c’était du kidnapping étatisé. Ensuite, la Russie ne s’est plus cachée derrière son hypocrisie. Aujourd’hui, c’est plus de 19500 enfants ukrainiens qui auraient été enlevés… Seuls 1480 ont pu rentrer chez eux, selon un bilan établi par Kiev et publié par The Kyiv Independent.
Et bon courage pour essayer de retrouver les autres car, explique Mykola Kuleba, « Grâce à une nouvelle loi, l’Etat russe peut modifier leurs noms de famille et leurs dates de naissance. »
Sans foi ni loi, Poutine joue sur un double tableau cynique : il exhorte à la générosité humaine, « offrez à ces enfants une famille et un avenir radieux », et il calcule froidement « combien de divisions ? » Exposés à la propagande russe dont il possède tous les leviers, ces gosses feront une chair à canon salutaire.
Bon, on sait tout cela. C’est désespérant. Mais le peuple Russe ? S’aligneront-ils derrière ces injonctions, ces mensonges ? Jusqu’où va leur crédulité ? leur aveuglement ? Leur obéissance ? Leur terreur ? L’écrire, le redire avec des chiffres vérifiés, c’est le moins qu’on puisse faire.
Catherine Schwaab