Depuis Me-too et l’avènement de Trump, fleurissent sur le web quantité de blogs valorisant l’épouse à la maison, bonne cuisinière, bonne mère au service de son mari, de ses pulsions, etc. Par conviction ? ou par stratégie ?
The Darling Academy de Alena Kate Pettit a quitté Instagram à cause des “haters” mais continue sur Facebook et son blog à promouvoir le mariage, la fidélité, la tradition…
On s’y attendait ; en réaction aux excès du néo-féminisme, - le militantisme transgenre, les woke les plus saugrenus, la suspicion anti-mâle…- ça devait arriver : des milliers, des dizaines de milliers - des centaines de milliers ! - de followers s’emballent pour la contre-offensive, le retour aux clichés de genre qui datent des années cinquante, les « tradWifes », les épouses traditionnelles : femme au foyer, bonne mère, bonne cuisinière… Bon coup ? This is the question.
Sexe fragile, toujours
Car, ne nous cachons pas derrière notre feuille de vigne. L’un des buts de ces blogs #tradfem, #vintagehousewife, esteecwilliams et autres Darling Academy pomponnées comme des Barbie, c’est peut-être de réhabiliter les fonctions domestiques au service de son homme, d’accord. Mais c’est surtout de rassurer ce pauvre mâle tenaillé par une mise en doute de sa virilité. La tradWife est là pour faire du « renforcement » comme on dit en psy. Pour re-solidifier sa masculinité… ramollie.
Oui, on croyait l’affaire réglée. Mais pas du tout : certains mecs ont regardé le train passer sans se bouger. Ils ont bien remarqué qu’au boulot, il y a plus de cheftaines, que dans le show-business et dans le sport, les femmes s’imposent plus que les messieurs, ont observé aussi que dans une fête, la fille ne s’embarrasse pas de chichis : si tu lui plais, elle fait le premier pas, prend l’initiative, satisfait ses pulsions sans hypocrisie. Et ne se gêne pas pour te mettre la honte si tu n’as pas assuré.
La”vraie” vintage housewife des fifties !
Eh bien, la « tradWife », elle, n’a pas ce genre de culot. Question drague, elle la joue « old school », et dans l’intimité, elle l’assure, elle est prête à sacrifier son propre plaisir pour te mettre en valeur et te faire croire qu’elle a super-joui. Et voilà son homme tout requinqué le matin quand il part gagner l’argent du foyer.
Ensuite, pas besoin de vous faire un dessin : Madame a la journée devant elle pour trouver de quoi se satisfaire. Avec son sex-toy et avec un (ou deux) amants, c’est dans les règles de la gentille famille bourgeoise. Catho ou puritaine à l’américaine, ni vu ni connu, les apparences sont sauves.
Vintage wife au 2ème degré
Une fois l’idéologie posée - make vintage-wife great again - l’objectif de ces futures épouses parfaites est, comme autrefois, comme aujourd’hui, de mettre le grappin sur le bon parti. Rien de nouveau. Sauf qu’à présent, elles s’en vantent. Mais avec un deuxième degré gros comme une Cadillac Eldorado. Il faut être aveugle pour ne pas voir que cette génération 2.0 née avec les Kardashian joue un rôle travaillé sur mesure. Fondé sur les bouleversements de son époque me-too, le job de ces créatures n’a rien de facile : jouer les caricatures de la femme au foyer soumise à son grand homme, au service de ses manies, de sa gourmandise et de ses désirs exige un talent. En regardant leurs vidéos savamment niaises, on a envie de les claquer, et c’est le but recherché.
L’Américaine Estee Williams totalise 121000 followers sur Instagram, 197 000 sur TikTok, etc…
Marketing en diable, elles s’inscrivent dans un conservatisme puant, mais ne rêvons pas, elles sont sans conviction. Les pauvres milliers de followers qui les écoutent vont se retrouver (pardon) cocues : épuisées, inféodées, dénigrées. Paumées.
Les bloggueuses « tradWifes », elles, auront divorcé. Elles auront remis au goût du jour le style Madonna-toy-boy. Ou nous la joueront « Gazon maudit ».
Catherine Schwaab
Catherine Schwaab
Paris Match - Sciences Po - IFM - Personnalités, mode, tendances et découvertes
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