DANS L'OEIL DE CATHERINE SCHWAAB

Sorties parisiennes, bons plans parisiens et autres, chroniques et réflexions sur la vie, la mort, les djeuns et la coiffure !

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Par Catherine Schwaab
13 juil. · 2 mn à lire
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Injections esthétiques : Les femmes, et les hommes aussi

Se pomponner, s’embellir, maintenir sa « fraîcheur » a un coût… Et révèle notre éternelle insécurité. Qui touche maintenant les deux sexes.

Sur TikTok, la polémique fait rage autour du coût exorbitant d’un premier rendez-vous amoureux. Des filles s’indignent de dépenser des fortunes en vue de la rencontre : nettoyage de peau, maquillage, coiffure, épilation… En conséquence, elles vous le disent tout net, « ce devrait être à eux de payer les frais de la soirée, drink, dîner, essence, club… »  C’est la crise ? Ou nous sommes devenues de froides calculatrices américaines  ?

Taylor Swift se pomponne... et se fait inviter !Taylor Swift se pomponne... et se fait inviter !

En y réfléchissant, il est vrai qu’une fois le « date » - et la date – établi(s), on est supposées (és) s’y préparer, disons, matériellement. Donc, on met la 5ème. Des mois que je n’ai pas eu d’amoureux, je me suis un peu relâchée, peau terne, racines, poils, un ou deux kilos en plus…  Se ressaisir a un coût, c’est vrai. A part le régime, il y a le coiffeur, l’institut de beauté, le bon fond de teint, le bon mascara… Sans parler de la tenue vestimentaire, cette petite soie griffée qui m’a coûté un bras (un bras auto-bronzé Helena Rubinstein). Pas donné tout ça. Le jour J, on est resplendissante. Cheveux brillants, œil ravageur, pommettes, lèvres, manucure impeccables. Taylor Swift. « Et à l’arrivée, certains ne te complimentent même pas ! » enragent-elles. Les mufles. Il ne voit rien, le rustre ? Ou il se dit « qu’il le vaut bien » ?

Mais non, jeune homme, rien n’est jamais acquis. Tu te pavanes ce soir avec une belle fille, eh bien, c’est un capital, ça rehausse ton image, ça flatte ton petit ego. Alors un conseil, même si tu n‘aimes pas tout (ce lipstick trop rouge, ces ongles trop griffus, cette couleur criarde…) même si tu es déçu, envoie les flatteries, ça n’est jamais perdu. Ainsi, en supposant que tu ne règles pas toutes les additions, au moins tu auras marqué un point : le type n’est pas un beauf.

 

Une nouvelle clientèle qui veut « rester jeune »

L’affaire mérite qu’on s’y arrête. Au fond, que traduisent toutes ces dépenses ? Notre légendaire insécurité féminine.  Rien de nouveau. Mais aujourd’hui, l’insécurité n’est plus seulement le fardeau des femmes. « Eux » aussi commencent à être en lutte pour plaire. Et pas seulement les gays, plus « body-conscious » depuis toujours, et qui connaissent le problème. Quand vous interrogez la doctoresse Wanono, médecin esthétique, la réponse fuse : « Depuis le covid, les rendez-vous explosent. Des patients qui ignoraient tout de la médecine esthétique mais qui veulent « faire quelque chose ». Il y a des femmes de tous âges, souvent quinquas et plus, qui n’auraient jamais franchi le seuil d’un cabinet d’esthétique, et des hommes de moins de 40 ans qui s’intéressent vraiment à leur séduction physique, à leurs défauts.” Les mâles plus vieux ? Eux ne se sentent pas concernés.

Une sociologie nouvelle et économiquement prometteuse où l’on comprend pourquoi l’ex-ministre Olivier Véran, neurologue de son métier, a songé à bifurquer vers la médecine esthétique. Il vient d’y renoncer finalement, après sa formation. « Je serai consultant bénévole en neurologie au CHU de Grenoble, après avoir été expertisé par mes pairs et le conseil de l’Ordre » annonce-t-il.  Tant mieux. Ca faisait d’un cupide…

Olivier Véran va rester "bénévolement" dans la neurologieOlivier Véran va rester "bénévolement" dans la neurologie 

Beauté, santé, même combat

« Les hommes sont une page blanche ! Il y a tout à faire … » résume la Dr Wanono. En clair : le marché est large. Si elle n’a pas encore réussi à convaincre son père de venir faire un tour dans son cabinet, en revanche, avec ses nouveaux patients, elle fait de la pédagogie : elle passe maintenant autant de temps à expliquer sa discipline et ses implications qu’à piquer, injecter, lasériser, hydrater, hyaluroniser, botoxer… Car il faut l’éduquer, cette clientèle qui a passé son confinement à se regarder dans le miroir, découvrir ses rides, ses ridules, ses taches, sa peau desséchée, son « sillon naso-génien », sa « vallée de larmes », ses « alpha et omega de l’anxieux », son cou de dindon, son double menton…  Jamais eu le temps de s’ausculter dans le détail avant le covid. Et je ne vous parle que du visage.

Botox effaceur de rides, acide hyaluronique volumateur, les petites touches qui rafraîchissentBotox effaceur de rides, acide hyaluronique volumateur, les petites touches qui rafraîchissent

La doctoresse enregistre les doléances et donne ses consignes :  on va arrêter le tabac, le soleil, le mojito (même un soir sur deux). Sinon, à quoi ça va servir que Wanono elle se décarcasse si c’est pour tout gâcher par une vie de patachon (ne) ? Certains, certaines se sont trouvés transfigurés. Grâce aux petites piqûres bien sûr, un coup de fraîcheur, mais aussi parce que soudain, homme ou femme, on a changé de vie. Carafe d’eau, diététique et circonspection pendant les fêtes et les vacances.

 

Une drôle d’égalité hommes-femmes

On peut s’en réjouir, bien sûr. Mais on peut aussi envier Monsieur Wanono Senior qui s’en fout. Bel homme, il est content de son allure. Il ne se pose pas de problèmes de vieillissement, de flétrissement, de ramollissement, le veinard. En un mot, il n’est pas touché par cette insécurité galopante. Un homme, un vrai, ça vole au-dessus de ces coquetteries. Traits avachis, cernes, points noirs, peau terne, l’air fatigué, moche… Un discours de gonzesse, ça. Un discours de dinosaure vintage ?  

Le néo-féminisme nous a pourtant martelé qu’on n’en est plus là. Eh bien, si. On a beau se dire que la beauté est intérieure, ben voyons. Mon miroir ne ment pas. Et quand je compare ma peau à ma, mon (jeune) voisin-ne de bureau, de cantine, de métro… eh bien y a pas photo. Il faut prendre des mesures.

Complexés comme des ados boutonneux, là au moins on est (presque) à égalité, hommes nouveaux et femmes de toutes générations. Ensemble dans la lutte (finale). Une bataille perdue ?

Catherine Schwaab